Gil Anselmi[FRA]
- Photographie & Cinéma
Chronique
Gil Anselmi, jeu de lumières
Alors que nombre d’entre vous ont débuté leurs vacances de Noël aujourd’hui, Tafmag vous propose de découvrir l’univers glossy, coloré et plein d’ironie de la photographe parisienne Gil Anselmi.
Par une froide journée d’hiver, Gil arrive dans ses habits de lumière, un grand sourire aux lèvres, la démarche déterminée. À 24 ans, la jeune photographe sait déjà ce qu’elle veut et ce n’est clairement pas une interview qui lui fait peur. Attablée autour d’un latté bien chaud et parfaitement dessiné, Gil me parle de ses débuts dans l’image, ce monde désormais infini où le réel fusionne avec le digital. Véritable autodidacte, la photographie semblait la voie toute tracée pour cette fille d’esthètes – un père directeur créatif et une mère styliste – qui commença à manier le reflex dès l’âge de 14 ans. Dix ans plus tard, Gil n’a jamais lâché son appareil. « J’ai toujours aimé la mode, dans le vêtement. Je viens d’une famille de bobo et ma mère m’a vraiment donné goût au fait de posséder une belle pièce et de la poncer jusqu’au bout. J’ai toujours aimé les looks originaux et je préfère m’habiller en vintage qu’en fast fashion ».
L’ostentatoire ne lui fait pas peur, bien au contraire, cela l’inspire
Petite déjà, Gil aime ce qui se voit, ce qui brille. L’ostentatoire ne lui fait pas peur, bien au contraire, cela l’inspire. Si elle se voit déjà créatrice de tendances, c’est finalement l’univers de l’image qui la séduit. Après le lycée, Gil hésite entre la photographie et le cinéma qui la passionne déjà, notamment l’univers étrange et WTF de David Lynch. « À l’époque, je trouvais le cinéma moins chiant que la photo mais très vite la mode m’a rattrapé et j’ai compris que je voulais créer des images de mode ». À seulement 17 ans, le bac en poche, Gil parvient à entrer à l’école des Gobelins où elle apprend la technique, les codes et références du monde visuel. « J’ai fait mon premier édito à 18 ans pour Just Magazine. Je me cherchais encore, c’était vraiment le début de mon esthétique. En première année, j’aimais vraiment tout ce que je voyais et le peu de fois où je n’aimais pas une image, j’étais incapable d’expliquer pourquoi. Puis en deuxième année, mon goût s’est affiné et j’ai commencé à comprendre ce qui me plaisait vraiment ».
Dix ans plus tard, Gil sait toujours ce qui lui plait. Ou plutôt, elle sait exactement ce qui ne lui plait pas. Pour la photographe, chaque détail compte. Dans ses images, elle zoome « à 300%” pour atteindre la photo la plus parfaite possible. Il y une quête de perfection évidente dans mon travail. Je ne suis pas une photographe de l’instant. J’ai besoin de tout maîtriser ». Dès ses débuts, Gil regarde des tutos pour apprendre à utiliser les logiciels de correction d’image. « Je voulais vraiment créer un univers qui m’était propre et qui n’existait qu’à travers mon œil. Je voulais créer ma propre réalité ». Parmi ses références, Gill cite tout de suite David La Chapelle qu’elle vénère : « Chacune de ses compositions est comme une photo de la Renaissance. J’adorerai zoomer sur ses images pour découvrir chaque détail qui s’y cache ».
« Je suis aussi très admirative de tout ce que je ne fais pas ».
Si dans ses photographies, Gil préfère le voyant au discret, l’ostentatoire au minimalisme, ses influences restent variées. De David Lynch à l’Italie en passant par les films de la Nouvelle Vague, elle s’imprègne des différentes cultures visuelles qui l’entourent. « Je suis aussi très admirative de tout ce que je ne fais pas. J’adore les films français, notamment ceux de Claude Sautet auxquels mon style s’oppose totalement. J’admire la simplicité et la poésie incroyable de ses images. Finalement, j’aime aussi quand une image te touche sans en faire trop ». Gil n’a donc pas peur non plus des paradoxes. Quand on lui demande la définition d’une « bonne » photo, la photographe nous dit que la réponse se trouve dans la maîtrise parfaite de la technique et des éléments. Faire une image, puis prendre le temps de la contempler, c’est important « on est de plus en plus submergé par un flux d’images incessant. On n’a plus vraiment la concentration nécessaire pour réellement approfondir une image et l’analyser ».
Depuis Pantin où elle vit, Gil travaille sans relâche, elle a encore « des rêves à la pelle ». Aujourd’hui, la créative navigue entre l’univers de la mode, de la musique et de la décoration pour qui elle crée des images colorées et insolentes avec la fougue de la jeunesse et de ses rêves dorés. La jeune photographe aimerait aussi travailler avec de grandes publications comme Paper Magazine ou The Pop Mag ainsi que pour de grandes maisons de mode à l’instar de Gucci, Miu-Miu ou Jean Paul Gaultier. Sans oublier son premier amour pour le cinéma : un jour, Gil aimerait franchir le rubicon et passer à la réalisation. Mais son véritable rêve se résume en un mot : la collaboration. « Ce que je préfère, c’est la rencontre. J’adore rencontrer de nouvelles personnes et m’imprégner de leur talent, de leur énergie. La collaboration reste pour moi ce qu’il y a de plus propre à notre génération »