Manon Cardin[FRA]
- Illustration
Interview
Un citron bien jaune, au goût acidulé, et c’est déjà l’été dans nos cœurs. Même en ce début de mois de février. Impossible de l’expliquer, les citrons chantent le bonheur de l’été. Évoquent une belle tablée de potes dans un jardin du Sud de la France où l’on entend les cigales chanter. Loin du Blue Monday et de la déprime de l’hiver, les dessins fruités et fleuris de Manon Cardin sont l’équivalent illustré d’une bonne dose de vitamine C. C’est pour ça qu’on aime tant son travail et qu’on est ravies de vous annoncer que Manon est notre nouvelle artiste représentée sur notre boutique en ligne. Pour réchauffer votre intérieur et vous faire déjà rêver au mois de juillet. Ou redonner le sourire à votre moitié. Eh oui, la Saint-Valentin se rapproche. « When life gives you lemons, make lemonade », mangeons des fruits et gardons le sourire. Le monde de Manon, fourmillant de détails, oscille entre la mode et les fruits, interview vitaminée.
LE CITRON, C’est la vie !
Manon, qui es-tu ? D’où viens-tu ?
Après mon bac, j’ai fait les Beaux-Arts de Poitiers. Après ça j’ai pas mal voyagé, aux États-Unis notamment. Et à mon retour, comme j’avais déjà bossé pendant mes études sur le vêtement, j’ai décidé de me lancer dans la mode. J’ai donc fait une formation pour adultes dans la couture avant de travailler chez Chanel en tant que couturière pendant 6 mois. Les conditions de travail étaient horribles ! Ce n’était pas possible pour moi. Je suis donc montée à Paris et j’ai repris des études dans le stylisme. Il y a un an encore j’étais styliste maille chez Balmain. Et depuis un an, je suis freelance en illustration et graphiste.
« Il y a un an encore, j’étais styliste maille chez balmain. »
Mais comment s’est opéré ce passage entre la mode et l’illustration ?
J’ai toujours dessiné. Je dessinais surtout beaucoup pendant mes voyages et mes temps morts en fait. Et du coup, plus je travaillais et moins j’en avais. Je n’avais plus ces moments qui me permettaient de m’évader. Quand j’ai commencé à étudier le stylisme, j’ai découvert que j’adorais vraiment dessiner les vêtements et le corps, au-delà du reste. C’est là que j’ai commencé à dessiner des silhouettes, des personnages avec des attitudes un peu plus mode. Et ce qui m’a surtout fait un déclic, c’est que le boulot de bureau ne me correspondait pas du tout. Je ne me projetais pas du tout dans ce poste, à être enfermée des années devant un ordi. En plus de ça, le monde du luxe ne collait plus du tout à mes attentes humaines et écologiques. Je me perdais complétement par rapport à mes valeurs. Je me suis donc demandé qu’elle était la seule chose que j’aimais faire, et surtout que je pouvais faire tout le temps sans me poser de questions, et c’était le dessin.
Comment tu décrirais-tu ton style aujourd’hui ?
J’ai toujours adoré les détails. J’essaie de m’en extraire un petit peu aujourd’hui, mais ça revient toujours. J’adore les détails. Je ne peux pas faire simple. J’aime passer des heures sur des dessins. C’est ce qui me plaît, le côté fourmi.
Pourquoi VOULOIR t’en extraire ?
Parce que j’essaye encore de me trouver, ça ne fait qu’un an que je fais ça. J’ai envie aussi de faire évoluer mon travail. Mais je manque de temps car les projets pros arrivent de plus en plus. Donc j’ai en fait très peu de temps pour créer. C’est dur de se dégager du temps pour travailler vraiment son propre univers.
« JE NE PEUX PAS FAIRE SIMPLE. J’aime passer des heures sur des dessins. »
Quel medium utilises-tu ?
Pour tous mes projets et recherches personnelles je travaille à main. Papier, crayons, encre, feutres, Bic, gouache, collages. Puis je scanne et je retravaille après sur Photoshop.
Les citrons, les fleurs PEUPLENT TON TRAVAIL, quel est ton rapport à la nature ?
Je ne suis pas du tout citadine ; je viens vraiment de la campagne, d’un petit village très reculé, dans la campagne profonde et j‘ai toujours eu une relation hyper fusionnelle avec l’environnement que j’avais autour de moi. Des champs, un marais… J’ai grandi en pleine nature et c’est quelque chose qui me nourrit énormément. J’ai un côté très fleur bleue où je peux passer des heures à aller me balader dans les champs et regarder chaque petite fleur. C’est ce côté contemplatif que j’adore.
Et pourquoi ce focus sur les fruits ?
Tout bêtement parce que j’ai commencé un jour à dessiner avec ce que j’avais sous la main. J’ai dessiné une corbeille de fruits que j’avais chez moi. Il y avait beaucoup de citrons dans cette corbeille. J’en ai dessiné deux, trois, quatre, cinq, six… Et cette illustration a tout de suite cartonné, j’ai commencé à en vendre grâce à elle. C’était un coup de poker. Mais les fruits font partie de cet univers de nature. Je dessine simplement ce que j’ai sous les yeux et ce qui m’entoure. J’ai aussi beaucoup de plantes chez moi. Ça peut être aussi des légumes quand je rentre du marché. J’adore les couleurs. Je trouve que les fruits sont merveilleux au niveau de leurs formes, de leurs couleurs. C’est passionnant ! Et puis ça nous touche tous, c’est universel. On sait qu’on a besoin des fruits pour vivre. C’est plein de vitamines. Le citron c’est la Sicile, c’est l’été.
« On sait qu’on a besoin des fruits pour vivre. »
TA PLUS GRANDE SOURCE D’INSPIRATION ?
Je suis aussi allée plusieurs fois au Mexique où les fruits sont très présents dans la culture picturale. Leur Dieu c’est quand même le Maïs. Tout ça, ça me parle. Je pense que ce sont un peu des dieux pour moi tous ces petits fruits finalement.
Quand tu dessines l’humain, tu insistes sur les cils ET les cheveux au crayon noir. Pourquoi ?
Quand je travaille un visage pour moi le plus important c’est le regard. C’est-à-dire ce qu’on va faire passer par l’expression du visage, la singularité aussi, l’attitude. J’adore les détails, les cheveux, les yeux, les cils, la bouche. Les émotions passent aussi par tout ça.
En ce moment l’illustration penche plus vers le minimalisME, toi tu aimes les détails. Comment tu expliques ça ?
Je sais qu’il y a cette vague de minimalisme que j’adore. Et parfois j’aimerais me mettre à en faire mais je n’y arrive pas en fait. Je suis quelqu’un de pointilleux, quand je fais la déco chez moi je vais aller dans les moindres détails, je suis comme ça. Après c’est aussi la déformation du stylisme : on doit voir les détails qui font la différence.
Si tu devais choisir : l’humain ou les fruits ?
Les fruits !
Tu es Présentée sur l’eshop Tafmag, une bonne raison d’acheter tes œuvres ?
C’est dur ça, je n’ai pas de répartie en plus (rires). Je dirai qu’acheter aujourd’hui des œuvres d’artistes c’est le meilleur placement qu’on peut faire. Parce que dans le monde dans lequel on vit il faut encore donner sa place à l’art. C’est la seule qui nous fait le plus rêver. Si il n’y a plus de création dans le monde où on vit, ça va devenir terrible.
« ce sont un peu des dieux pour moi tous ces petits fruits finalement. »