Clara Luciani[FRA]
- Musique
Clara Luciani, cette jeune chanteuse marseillaise de 25 ans à la belle voix grave, est partout. Depuis la sortie de son premier album solo, « Sainte-Victoire », elle enchaîne les interviews, les lives et les émissions. Impossible d’ouvrir un journal sans voir passer un article sur elle. Évidemment, il fallait qu’elle soit aussi chez Tafmag. Elle nous a séduites par ses paroles féminines et féministes « Sous mon sein la grenade », « T’as jamais vu une femme qui se bat » et son allure élégante. C’est une femme simple, timide mais pleine de vie que l’on découvre derrière notre caméra.
Interview
Le matin de notre interview, aux détours des stations de métro, on croise partout le regard de Clara sur l’affiche orangée de son album. On est donc forcément un peu intimidée. Clara est déjà bien installée dans le milieu musical, elle a notamment fait partie pendant plusieurs années du groupe La Femme. Mais la jeune chanteuse a su avancer en gardant la tête sur les épaules et la femme que l’on rencontre est surtout naturelle et modeste. Fatiguée par ses nombreuses interviews du moment, elle s’excuse quand elle baille entre deux questions et nous confie avoir encore la boule au ventre à chaque concert.
MESSAGE PERSONNEL
Quand on demande à Clara de se présenter ça donne ça : « Bonjour, je m’appelle Clara Luciani ». « Très sobre » commente-t-elle elle-même en riant. La chanteuse est déjà sur le chemin de la musique depuis un moment. Elle a d’abord accompagné au chant pendant deux ans le groupe La Femme dès ses débuts, elle a aussi fait de nombreuses collaborations, avec Nekfeu par exemple et a sorti un EP, « Monstre d’Amour », déjà une réussite. Aujourd’hui, c’est l’album.
Si Clara écrivait déjà des chansons petite, elle n’aurait pour autant jamais pensé que cela puisse un jour devenir professionnel. Et puis elle s’est dit « En fait c’est ce que j’aime le plus faire » et désormais elle trouve formidable d’en avoir fait son métier. Sinon, elle aurait sûrement été pâtissière confie-t-elle, un autre métier créatif. Ou écrivaine. Et elle rajoute vite, avec la modestie qui la caractérise, « mais je n’en ai ni le talent, ni la rigueur ».
Si son père faisait de la guitare, et lui a donc donné un certain goût pour la musique, elle a pourtant toujours refusé d’écouter ce que ses parents écoutaient. Plus jeune, elle était fan de Britney Spears, comme les filles de son âge, jusqu’à ce qu’un garçon, qui a changé sa vie, lui fasse écouter dans le bus scolaire, « les choses de base », comme les Rolling Stones, les Beatles, les Who et surtout The Velvet Underground, son groupe préféré « de tous les temps. »
Après deux années passées sur les routes avec La Femme, qui lui ont appris « la débrouille » et la persévérance, elle livre aujourd’hui sa « Sainte-Victoire ». Avec eux elle est passé des petites salles de Londres où le groupe était payé tout juste 20 pounds jusqu’au Zénith à Paris. « Un vrai dépucelage musical » qui l’emmènera sûrement très loin.
UN FOU RIRE PAR JOUR
Si dans son premier EP, « Monstre d’amour », Clara évoquait surtout un chagrin d’amour douloureux sur des sonorités très mélancoliques, elle désire maintenant avec son album « Sainte-Victoire » prendre sa revanche et montrer toutes les facettes de sa personnalité, aller vers la lumière. Et surtout montrer son côté joyeux. La Clara qui danse et qui rit aux éclats, celle que l’on voit dans le clip de sa reprise du morceau « La Baie », s’amusant en coulisses avec ses musiciens.
« Dans ma vie il ne se passe pas un jour sans que je rie »
Son album, à son image, mêle des ambiances variées et offre un voyage du disco dark au très intimiste. « Je voulais qu’on puisse comprendre que j’aime vivre et danser, mais qu’à la fois, j’ai une hypersensibilité et que je peux pleurer des torrents de larmes. » Clara est une artiste entière, qui dévore la vie. Le titre de ce premier album, que Clara a pensé comme son reflet, « Sainte-Victoire« , un petit clin d’oeil à la région de son enfance, la Provence.
Si Clara est très joyeuse et ne cesse de rire durant toute notre interview, elle est aussi timide. Elle nous confie par exemple, que si elle essaie de soigner son apparence et de faire attention à la façon dont elle s’habille, (même si elle avoue passer aussi certains jours en pyjama), c’est parce qu’elle n’a pas toujours confiance en elle et que « ça aide de porter un vêtement dans lequel on se sent bien ». Alors on s’étonne, Clara Luciani, celle qui chante « prends garde sous mon sein la grenade » avec une détermination conquérante et qui enchaîne les lives, les concerts et les festivals, n’aurait pas confiance en elle ? Difficile à croire !
« C’est horrible, parfois je me dis : Mais Clara qu’est-ce que tu fabriques !?», confie-t-elle en précisant qu’elle est encore angoissée avant chaque concert. Puis, elle ajoute vite qu’en même temps la scène c’est « une des plus belles choses au monde » et que c’est surtout « très addictif ».
UNE FEMME DE SON ÉPOQUE
Clara s’inspire de femmes fortes pour tracer sa voie. Françoise Hardy, Nico… Pour leur élégance intemporelle et surtout leurs voix « très droites, sans chichis ». Elle rêvait d’ailleurs au moment de notre interview de rencontrer Françoise Hardy et d’après son compte Instagram, c’est maintenant chose faite. Mais si elle a la même coupe qu’elle, Clara explique quand même que c’est un pur hasard, puisque elle a cette frange depuis ses 5 ans.
Son album est aussi un recueil de femme avec des titres comme « La Grenade » ou « Drôle d’époque ». La chanteuse raconte avoir pris ce tournant plus féministe dans ses chansons à force d’entendre les remarques des mecs du style « Tu veux de l’aide pour brancher la prise ? », « T’es drôle pour une fille ». Du coup dans ses titres, Clara nous invite à nous méfier car derrière les apparences, il y a « une femme qui se bat ». D’ailleurs pour elle, « le combat féministe doit être permanent » et ne doit surtout pas s’arrêter après l’emballement des derniers mois.
« Il y a encore beaucoup de choses pour lesquelles on doit se battre aujourd’hui en tant que femme. »
Ensuite, elle nous raconte son titre, « Drôle d’époque », un morceau autobiographique où sa voix grave si sincère prend la défense des femmes, à qui l’ont dit toujours quoi faire, à quoi ressembler. « Cette chanson elle dit qu’on en demande trop aux femmes et surtout qu’on leur demande d’être beaucoup de choses contradictoires. Elles doivent être mère, Sainte, sexy, rassurante. Il faut elles soient très minces tout en ayant les fesses de Kim Kardashian ». Face à ce poids énorme, Clara affirme donc qu’être une femme de son époque c’est refuser tous ces diktats et dire : « Je suis comme je suis et c’est déjà très bien. »
UNE ÂME DE ROMANTIQUE
Si Clara s’improvise féministe dans son album, elle est aussi très romantique. Si elle s’est mise à la musique, c’est pour extérioriser un chagrin d’amour, « très douloureux ». Mais la musique l’a guérie et la jeune femme se sent aujourd’hui, « complètement en paix ». Ses chansons, elle les a pensées comme « un journal intime », une autobiographie des choses qu’elle a traversé.
Son titre préféré dans « Sainte-Victoire », c’est d’ailleurs « Les Fleurs ». Un morceau inspiré d’une réplique de Daisy Buchanan dans Gatsby le Magnifique, « Tu es comme une rose parfaite ». Clara commente en riant, « C’est quand même cool comme compliment. Si un garçon me dit ça un jour, je pense que je rentre avec lui direct ».
Et quand on la titille un peu sur l’obsession des artistes de sa génération à écrire des chansons d’amour en délaissant les textes engagés, elle a une réponse très simple. « Moi j’ai du mal à poétiser les idées politiques et à les rendre sonore, ça me dérange ».
La chanteuse finit l’interview sur une touche d’humour, bien entendu. Elle rit aux éclats quand on l’interroge sur la question qu’elle aimerait qu’on lui pose, mais qu’on ne lui pose jamais. « J’aimerais bien qu’on me dise : mais Clara comment tu fais pour avoir l’air si jeune et si fraîche ». Si vous voulez connaître son secret, c’est très simple, simplement rire tous les jours, « beaucoup ».
Clara par sa fraîcheur et sa simplicité nous a tellement séduites, qu’on a d’ailleurs (intentionnellement ou non, on laissera planer le mystère), foiré notre première interview vidéo, juste pour avoir le plaisir de la revoir et de recommencer…